Une chambre en Inde – Théâtre du Soleil 15 février 2017 in Les chroniques de Tata Nicole En janvier 2016, Ariane Mnouchkine a embarqué toute sa troupe dans le Sud de l’Inde, à Pondichéry, pour parler et rire des attentats de Paris et du chaos du monde. Le spectacle se déploie sur le vaste plateau du théâtre du Soleil qui devient une chambre en Inde dont les immenses persiennes filtrent la rumeur de la rue, tandis que de grands ventilateurs brassent la moiteur ambiante. Dans cette chambre séjourne Cordélia qui doit assumer la direction d’une troupe de théâtre, invitée par l’Alliance Française, pour construire un spectacle. Le directeur, Constantin Lear !!!, foudroyé par l’horreur des attentats de novembre à Paris, a fui. La police l’a retrouvé nu et éméché se lançant à l’assaut de la statue de Gandhi. Cordélia tente de reconstruire une pièce mais elle n’a jamais rien fait. Elle n’a aucune « vision » et le sujet de ce spectacle ne peut que faire écho au chaos du monde. L’art pour tous, remède et appel à la liberté On voit principalement Cordelia au lit, en proie à des cauchemars évoquant les plaies de l’Inde mais aussi la folie du monde, de la Syrie à l’Afghanistan. Que peut le théâtre face au chaos du monde ? » Tous les théâtres pourraient disparaître sans que l’on s’en aperçoive ». Ariane Mnouchkine et le théâtre du Soleil répondent à la question de la nécessité de l’art, un art pour tous qui est un remède, un appel à être libre. L’Inde » mère d’abondance absolue » selon A.M, réaffirme la vigueur du théâtre.avec le Theru Koothu, théâtre traditionnel qui raconte les épisodes du Mahabharatha et du Ramayana. Cet art populaire indien apporte à la pièce de magnifiques échappées dans le rêve. Les acteurs jouent, vêtus de magnifiques costumes et de hautes coiffes colorés, des épisodes du Mahabharata, avec vigueur face aux doutes de cette petite troupe occidentale. Le choix du rire contre la haine Lorsque Cornélia s’endort et que les cauchemars entrent par les fenêtres, c’est la folie du monde et la haine brutale transformant des hommes en assassins, qui s’imposent. Contre la peur et la haine, la troupe du Soleil a choisi le rire. On peut ainsi voir sept talibans négocier le nombre de vierges auquel pourra prétendre le kamikaze qu’ils envoient se faire sauter sur une position américaine ou encore, ces dignitaires d’Arabie Saoudite qui demandent à la Ministre de la Culture islandaise, comment remonter dans le classement des pays respectant les droits de l’homme. Ariane Mnouchkine appelle au secours les dieux du théâtre. Shakespeare et Tchekov sont même convoqués sur scène. Si le premier voulait écrire des comédies, le second se désespère, accompagné des trois soeurs, Irina, Macha et Olga que ses pièces soient traitées sur le mode triste. C’est à Ch. Chaplin que revient le soin de conclure ce spectacle, avec le discours final du Dictateur mais Chaplin endosse ici non pas le costume d’Hitler mais celui…. Un spectacle éblouissant, un véritable émerveillement, » un acte de foi en l’art du théâtre et sa valeur universelle « . A ne pas rater, des prolongations sont prévues en juin et juillet car actuellement, difficile d’avoir une place. UNE CHAMBRE EN INDE, Théâtre du Soleil, Cartoucherie, route du Champ-de- Manoeuvre, 12e, jusqu’en Mars, prolongation du spectacle. Création collective du théâtre du Soleil, dirigée par ARIANE MNOUCHKINE